Sébastien Catroux, s'est rendu à Londres il y a quelques jours pour interviewer Robbie Williams. L'interview est parue ce matin dans le Parisien, daté du 18 Octobre.

Voici l'interview publiée ce matin dans le Parisien :

La compilation de ses tubes qui sort aujourd'hui prouve une fois de plus qu'il est un interprète brillant et exigeant. Pour autant l'Anglais Robbie Williams, 30 ans, semble ne jamais se prendre au sérieux. Rencontre avec une star pleine de contradictions.

Un hôtel de luxe sans âme au bord d'un canal, la semaine dernière dans le quartier de Chelsea à Londres. Tout d'un coup, un visage souriant attire tous les regards. C'est Robbie Williams qui vient d'arriver, pourtant discrètement, tout de noir vêtu, des baskets rouges aux pieds. Avec son compatriote George Michael, le trentenaire anglais est l'un des rares chanteurs à avoir réussi sa reconversion après avoir fait partie d'un boys band. Star adulée des deux côtés de la Manche, ce beau gosse à l'humour ravageur et à la présence scénique explosive est de retour aujourd'hui dans les bacs avec ses « Greatest Hits ». Rencontre.

Pourquoi sortir cette compilation maintenant ?

Tout simplement parce que ma maison de disques l'a décidé ! En même temps, c'est une bonne idée. Ça marque la fin d'une période de ma vie et le début d'une autre. Vous savez, un best-of n'est qu'un best-of. J'ai juste validé la sélection.

Vous avez tout de même réécouté quelques titres...

Même pas. Je ne peux plus les écouter. En fait, ça dépend des jours. Parfois, lorsque je tombe sur une de mes anciennes chansons, je la stoppe tout de suite ! D'autres fois, la même chanson me plaît et je l'écoute. Il m'arrive souvent de détester ce que j'ai adoré la veille.

Cela fait dix ans que vous travaillez en solo. Qu'avez-vous appris ?

Vaste sujet... Peut-être à ne pas prendre les choses trop au sérieux. Ne pas prendre de drogues, ça ne me réussit pas. Ne pas boire, ça ne me réussit pas non plus. J'ai aussi appris à être moi-même. Lorsque j'ai commencé ma carrière solo, je me prenais pour Liam Gallagher (NDLR : le turbulent chanteur du groupe Oasis). Je ne savais pas qui j'étais, je me suis découvert progressivement. Ça a été long et douloureux, mais ça a marché.

Vous êtes fier de vous ?

Pas autant que je le devrais. Mais ça vient. J'ai toujours été mon pire critique. Lorsque l'on fréquente trop longtemps quelqu'un, on finit toujours par le détester. Et s'il y a bien quelqu'un que je fréquente trop souvent, c'est moi-même.

Vous entretenez également un rapport particulier avec l'Angleterre, votre pays...

Londres n'est pas un endroit très amical. En dehors, c'est très différent. Les gens y ont un formidable sens de l'humour. En revanche, pour une raison que j'ignore, les Anglais détestent celui qui a du succès. Ils préfèrent l' underdog (NDLR : en langage sportif, ce terme est utilisé pour désigner l'équipe la plus faible, censée perdre). Et comme je ne suis plus un underdog ... En fait, j'aime les Anglais mais je hais les médias anglais. Ils sont guidés par le diable. Surtout la presse tabloïd. C'est pour cela que je ne vis pas ici, mais à Los Angeles. J'y ai les avantages de la vie de pop star sans les inconvénients de la célébrité.

Qu'est-ce ça signifie pour vous, « être une pop star » ?

Je ne sais pas ce que je serais sans ça. Je ne suis pas un intellectuel et je ne sais pas faire grand-chose de mes dix doigts. Ce boulot donne du sens à ma vie. En même temps, lorsque j'y pense trop, ça ne signifie rien du tout. Tout comme la célébrité. Ce n'est que du vent.

Que pensez-vous de la téléréalité ?

J'aime bien regarder « Popstars » ou « Pop Idol », je suis client. En revanche, j'aime moins la façon dont les candidats sont traités une fois le programme terminé. On les presse comme des citrons puis on les jette.

Ça vous rappelle l'époque ou vous faisiez partie du boys band Take That ?

Oui. J'étais très jeune et quasiment dans la même situation. En fait, je considère le nouvel et cinquième album qui sortira l'année prochaine comme mon premier album solo. J'y travaille actuellement avec Stephen Duffy, le premier chanteur du groupe Duran Duran.

Votre album précédent, « Escapology », était censé faire de vous une star aux Etats-Unis. Est-ce le cas ?

Non. Je suis plus préoccupé par mon confort de vie là-bas que par mes chiffres de vente.

L'Anglais Chris Martin, le chanteur du groupe Coldplay, qui est aussi le mari de l'actrice Gwyneth Paltrow, y est parvenu, lui...

C'est différent. Lui, il fait partie d'un groupe de rock, on dit qu'il fait de la vraie musique. Moi, je suis juste un personnage.

Vous n'avez jamais caché votre admiration pour Frank Sinatra...

Sa voix me fascine. Le personnage, aussi. Même si tout était bidon, il véhiculait une image magnifique. Il a fait partie d'une époque bénie, de la quintessence du show-business.

Vous vous considérez comme un play-boy ?

Pas autant que je le pourrais. J'ai une conscience et ça m'empêche d'en profiter vraiment. Et puis un play-boy ne couche qu'avec des femmes superbes... Ce n'est pas mon cas.

Que vous inspire l'actuelle crise de l'industrie du disque ?

Cette industrie gagne moins d'argent qu'avant, c'est sûr, mais ce n'est pas mon problème. Il y a au fond de moi un petit voleur qui m'empêche de condamner ceux qui téléchargent de la musique gratuitement.

Propos recueillis par Sébastien Catroux Le Parisien , lundi 18 octobre 2004